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L’art du demi-tour en randonnée : quand, où, comment ?

Posté par : François Jourjon 22 juin 2018 9 commentaires

Tout randonneur est amené un jour ou l’autre à se poser la question du demi-tour, notamment pour assurer sa sécurité ou celle de ses coéquipiers. Faire demi-tour n’est pas toujours facile, car il faut prendre la décision au bon endroit et au bon moment, on est parfois proche du but et c’est souvent vécu comme un échec mentalement. Bref, c’est presque un art… 😉

J’aborde tout cela en vidéo, en commençant par une anecdote vécue l’été dernier puis en continuant avec quelques conseils.


Transcription texte

Bonjour, ici François de Randonner Malin. Dans cette vidéo, nous allons parler de l’importance de savoir faire demi-tour et nous allons voir quelques petites astuces pour faire cela au bon moment.

J’ai pensé à faire cette vidéo après une petite mésaventure l’été dernier en Italie juste au sud du parc national du Grand Paradis. On était avec ma compagne, on voulait faire une petite rando à la journée dans un endroit où on n’avait pas encore été et en regardant la carte j’ai essayé de trouver une boucle qui était faisable parce qu’on a tendance à préférer les boucles par rapport aux itinéraires en aller-retour. Je n’ai pas en fait réussi à préparer un itinéraire en boucle juste en restant sur les sentiers parce que les boucles étaient trop longues pour un seul jour de rando et on s’est rabattu sur un itinéraire en aller-retour jusqu’à un col.

Le lendemain, on arrive au col assez rapidement, après environ 1000 m de dénivelé, on arrive je crois vers midi. On a mangé tranquillement et on se dit en fait qu’on aimerait bien marcher encore un peu, plutôt que de redescendre ce qui ferait une journée un petit peu trop courte. Je vérifie à nouveau sur la carte, forcément il n’y a toujours pas de boucle faisable pour retourner à notre point de départ. C’est là que je me dis qu’une boucle est peut-être jouable mais avec une section hors-sentier. Par contre, j’ai un doute sur un certain endroit parce que sur la carte les pentes sont à la limite entre le praticable et le non praticable. Ce n’est pas possible de le déterminer directement avec la carte, en fait ça dépendra vraiment du terrain. Je demande à ma compagne si elle est d’accord qu’on aille voir sachant que ça se soldera peut-être par un échec. Elle est d’accord, donc on marche un bon moment sur les crêtes, on peut d’ailleurs voir les lacs en contrebas que l’on aimerait rejoindre et on essaye de repérer s’il y a une combe – il y a plusieurs combes qui partent – s’il y en a une qui est assez praticable en tout cas pour descendre. Je trouve une combe, et je me dis que là il y a peut-être des chances que ça passe. C’est juste une section au bout de la combe qui est bien pentue à la fin, on ne voit d’ailleurs pas le bout, donc c’est vraiment la zone d’incertitude. On est tous les deux d’accord pour emprunter la combe sachant qu’on devra peut-être faire demi-tour. On fait bien attention de ne pas rester l’un au-dessus de l’autre parce que c’est une combe qui est assez pentue, qui a des blocs instables, pour ne pas se décrocher à un bloc l’un sur l’autre. On descend pendant un certain temps, à vrai dire environ 400-500 m de dénivelé jusqu’au passage incertain qui s’avère en fait infranchissable, je vous mets d’ailleurs une photo pour vous donner une idée. En tout cas, on n’avait pas envie de prendre le risque – peut-être qu’il aurait été franchissable, mais on n’avait pas envie de prendre le risque. Pour faire court, on a ensuite continué à chercher s’il n’y avait pas un passage un petit peu plus à droite, un petit peu plus à gauche, parce qu’il y avait probablement uniquement une cinquantaine ou une centaine de mètres de dénivelé qui nous séparait de l’endroit que l’on voulait rejoindre en contrebas, donc on n’était vraiment pas loin du but, de réussir à faire notre boucle. L’autre option si on n’arrivait pas à franchir ce dernier petit passage, c’était beaucoup moins drôle parce qu’il fallait remonter les 400-500 m de dénivelé dans la combe qui était pentue, qui demandait de faire attention avec tous les blocs. Ensuite une fois qu’on aurait remonté ces 400-500 m de dénivelé dans cette combe il fallait retraverser toute la crête, qui en plus n’était pas facilement praticable parce qu’elle était constituée de gros blocs rocheux parfois instables, et finalement rejoindre le col où on s’était arrêté pour manger et ensuite refaire toute la randonnée en sens inverse. C’était clairement beaucoup moins drôle que si on avait réussi à passer ce petit passage.

À un moment, on s’est dit qu’il serait sage de faire demi-tour parce que à force on allait finir par prendre des risques que l’on n’était pas prêts à prendre, notamment parce que on était proche du but et qu’on avait plus envie de réussir à faire notre boucle et de passer par les petits lacs qui avaient l’air sympas, plutôt que de tout remonter. Mais on s’est dit que ça serait plus sage, on a donc fait demi-tour et je ne vous cache pas que ça a été une journée très longue. D’ailleurs on s’est même dit avec ma compagne que mon site ne devrait peut-être pas s’appeler Randonner Malin mais plutôt Randonner Crétin 😉. Si je vous raconte ça, ce n’est pas du tout pour me lancer ou nous lancer des fleurs pour avoir fait demi-tour, sachant qu’en plus je n’aime pas généralement trop faire demi-tour et que je ne suis pas le meilleur à prendre ces décisions, mais c’est surtout pour vous donner un exemple où faire demi-tour est difficile.

Il y a beaucoup d’exemples où c’est difficile. Ça peut par exemple être difficile quand faire demi-tour est plus long et plus dur physiquement que de continuer, comme dans l’anecdote que je viens de vous raconter. Ça peut être aussi difficile mentalement car faire demi-tour est souvent vu comme un échec et le cerveau humain n’aime pas tellement les échecs. Ça peut être difficile pour l’égo aussi – notamment quand on a un objectif, par exemple faire telle randonnée ou aller à tel sommet – et ça l’est d’autant plus quand l’objectif nous tient vraiment à cœur ou que l’on s’est beaucoup investi pour essayer d’atteindre l’objectif. Ça peut être également difficile quand on sent ou quand on pense que ça ne se joue pas à grand-chose, que l’on est presque dans les temps, qu’un passage à l’air presque jouable, que la météo n’a pas l’air si catastrophique que ça mais elle n’est pas géniale non plus, etc. C’est dans les moments où faire demi-tour est difficile qu’il est important de prendre les bonnes décisions car c’est ce qui vous évitera de vous mettre en danger, de mettre d’autres personnes de votre groupe en danger, ou même des sauveteurs en danger.

En randonnée, même quand on est bien préparé, on peut être amené à faire demi-tour car il y a toujours des imprévus et ça fait vraiment partie de l’activité. Ça peut être à cause d’un passage dangereux, ça peut être à cause de la météo, ça peut être à cause d’un manque de temps, à cause de la fatigue, d’une blessure, car une personne du groupe n’est pas en forme, une casse de matériel… Bref, il y a beaucoup de choses qui peuvent nous pousser à nous demander si on continue ou si on fait demi-tour.

D’ailleurs, si vous randonnez suffisamment régulièrement, c’est quasiment sûr que vous soyez amené un jour ou l’autre à vous poser la question. Mais dans ce cas-là, comment faire pour prendre la décision de faire demi-tour au bon moment ?

Le premier point important c’est de bien préparer sa randonnée, que ça soit physiquement, au niveau de l’itinéraire, du matériel, de la météo, etc. Mieux on est préparé, moins il y aura d’imprévus et moins on aura à faire demi-tour. Il faut aussi savoir ne pas s’engager dans un projet quand les conditions ne sont pas bonnes. Par exemple quand la météo n’est pas bonne, parce qu’on n’est pas en forme, parce qu’il reste encore trop de neige, bref ça évitera de devoir prendre la difficile décision de faire demi-tour surtout si le projet nous tient à cœur.

Un autre point important qui aide beaucoup à la décision de faire demi-tour est de se dire que faire demi-tour est une éventualité dès le départ, dès la préparation, qu’il est possible que l’on ait à faire demi-tour si jamais on a un imprévu. Idéalement, si jamais on sent qu’un imprévu est probable ou très probable, on peut même prévoir à quel moment ou à quel endroit faire demi-tour. Par exemple, si on a peur d’être un petit peu juste au niveau du temps, on peut se dire que si on n’arrive pas à tel endroit avant telle heure on fait demi-tour. Même chose au niveau de la météo, par exemple si le temps est orageux, on peut se dire que si jamais ça ne s’améliore pas, on fait demi-tour avant tel endroit. De la même manière, on peut se dire que si des dalles rocheuses sur un itinéraire sont toujours mouillées quand on y arrive, on fait demi-tour, ou que si tel passage est toujours enneigé, on fait demi-tour… Bref, ça aide vraiment de prendre la décision sur le moment quand on l’a déjà prévue en amont.

Se dire que c’est une possibilité, ça va aider le cerveau à moins voir le demi-tour comme un échec et il y a plus de chance que votre ego vous laisse tranquille. Anticiper la possibilité de faire demi-tour vous permettra que ce soit plus facile dans votre tête et aussi parce que vous aurez peut-être prévu la logistique. En plus, la décision a été prise à un moment où vous avez pu y réfléchir de manière lucide, ce qui ne sera pas nécessairement le cas quand vous serez fatigué, que vous aurez froid, que vous aurez faim, peur, etc. Je tiens à préciser ici que l’on parle de situations potentiellement dangereuses. Si jamais vous voulez vous dépasser d’un point de vue sportif, mais qu’il n’y a pas de danger vraiment en jeu, ça ne vous aidera probablement pas d’envisager le demi-tour comme une option.

Avant de partir, il est aussi important de vous fixer les règles du jeu, de vous demander quels risques vous êtes prêt à prendre et quels risques vous n’êtes pas prêt à prendre. On a tous une relation au risque qui est différente. Certaines choses que je fais paraîtraient probablement risquées à certains d’entre vous et vous n’accepteriez pas ce risque, et de la même manière certaines choses que font certains d’entre vous me paraîtraient probablement risquées et je ne serais pas prêt à prendre le risque – cela dépend vraiment de chacun. Ça dépend aussi de l’expérience, une sortie peut être risquée pour une personne et moins pour une autre qui est par exemple plus habituée à un type de terrain, ou qui a un petit peu plus de technique sur un certain terrain. Je pense qu’il est important de fixer ses limites avant de partir car quand on est confronté à une situation difficile, que l’on est fatigué, qu’on a froid, qu’on est en hypoglycémie, qu’on a peur, que l’on doit se dépêcher pour une raison ou une autre, on peut être amené à prendre des décisions qui ne sont pas vraiment rationnelles. Et si jamais les limites ont été fixées au préalable, ce sera un peu plus facile de prendre la bonne décision.

Un autre point important c’est d’anticiper, car en randonnée on ne peut pas généralement s’arrêter et dire, « Ça y est, j’en ai marre, j’arrête là, je rentre chez moi. » Faire demi-tour est parfois long, voire très long – c’est pourquoi il est important d’anticiper. Ça peut être avant de s’engager dans un passage qui va demander l’utilisation des mains, parce que monter est souvent plus facile que descendre, donc il faudra réfléchir avant de s’engager dans ce passage. Ça peut être aussi au niveau de la météo, ce n’est pas quand l’orage est installé qu’il faut commencer à se poser des questions ; il faut se poser les questions vraiment avant, essayer d’anticiper en regardant la météo. Il est aussi important d’anticiper la fatigue d’une personne dans un groupe ou sa propre fatigue, parce que ce n’est pas au moment où on est vraiment complètement rincé qu’on va se dire, « Tiens, il est peut-être temps de penser à faire demi-tour ou de chercher un raccourci. » Un autre exemple, ça peut être aussi d’anticiper le temps qu’il reste avant la tombée de la nuit pour éviter de se faire prendre par la nuit.

Un autre point que j’aimerais aborder est celui de la prise de décision. Parfois on est partagé entre continuer ou faire demi-tour. La première chose à faire dans ce cas, si c’est possible, c’est de prendre quelques minutes de pause pour souffler, éventuellement vous hydrater et manger, s’il n’y a pas d’urgence. Il faut absolument éviter de prendre une décision sous le coup de ses émotions, il faut essayer de ne pas se précipiter, essayer de prendre un peu de recul. Pour prendre la bonne décision : essayez de rester calme, réfléchissez aux différentes options qui s’offrent à vous et essayez d’évaluer pour chaque option les risques et les conséquences en cas de souci. Posez-vous la question : est-ce qu’en continuant, vous allez augmenter vos risques ? Repensez notamment aux limites que vous vous êtes fixés avant de partir. Honnêtement, si jamais vous ne vous sentez pas de continuer et pensez que faire demi-tour est plus sage, c’est sûrement signe qu’il faut faire demi-tour. Pour finir sur ce point, si jamais vous êtes en groupe, concertez-vous aussi avec vos coéquipiers car tout le monde n’a pas le même ressenti par rapport à une situation et tout le monde n’a pas non plus le même rapport au risque, tout le monde n’est pas prêt à prendre les mêmes risques.

Pour continuer sur la prise de décision, j’aimerais en rajouter une petite couche. Il ne faut pas voir le demi-tour comme un échec, mais plutôt comme une réussite à rentrer entier et en vie. Il y a un Australien une fois, qui m’a dit en anglais qu’il vaut mieux être une dinde en vie qu’un aigle mort, et je trouve que c’est assez parlant. Il faut aussi se détacher de ce que penseront les autres personnes. La peur de ce que pensent les autres, c’est une peur qui est très forte chez beaucoup de personnes mais il faut absolument s’en détacher pour prendre les bonnes décisions. Ce que penseront d’autres personnes parce que vous avez fait demi-tour ne doit absolument pas rentrer en compte dans votre décision. Honnêtement, les personnes pour qui vous comptez vraiment préféreront sûrement vous voir revenir en entier que de savoir que vous avez pris des risques démesurés ou ne pas vous voir revenir du tout. Faire demi-tour demande du courage, d’autant plus lors d’une randonnée ou un objectif qui nous tient à cœur et d’autant plus quand on en est proche.

J’ai par exemple beaucoup d’admiration pour les alpinistes qui font demi-tour à quelques centaines de mètres d’un sommet alors qu’ils ont investis des jours et mêmes des semaines dans une expédition par exemple, et encore beaucoup plus d’investissements en préparation. Ils ont pu faire de gros sacrifices, parfois ils ont même des petites pressions extérieures comme des sponsors, etc. C’est quelque chose qui demande une grande force et un grand courage, parce qu’ils n’auront peut-être plus l’occasion de retenter le sommet. Après, pour modérer un peu le propos, je dois dire que quelques centaines de mètres, des fois ça parait peu, mais ça demande parfois un effort considérable.

Voilà, j’espère que ces petits conseils pourront vous aider. J’ai parlé de demi-tour mais c’est aussi valable pour les plans B ou quand on doit raccourcir une randonnée. Dans tous les cas, n’oubliez pas qu’il vaut mieux sûrement se placer du côté de la sécurité en faisant demi-tour et pouvoir continuer à profiter d’autres randonnées par la suite.

Sinon, n’hésitez pas à me raconter en commentaire en dessous de la vidéo un demi-tour qui vous a marqué, soit pour avoir pris la bonne décision, soit pour avoir pris la mauvaise décision. Je lirais tout ça et on pourra échanger sur ce sujet.

Sur ce, je vous souhaite de belles randos et je vous dis à très bientôt !

Auteur : François Jourjon

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9 commentaires

  • Bibi

    Quelques demi-tours : je n’en ai regretté aucun.

    – Ça fait à peine 20 minutes que nous marchons, le ciel bleu se voile et il s’installe une ambiance d’orage. Rebroussant immédiatement chemin, nous traversons ce qui est en hiver une piste de ski et passons à côté de mats métalliques de canons à neige pointés vers le ciel. Ils grésillaient tous sous l’effet de l’activité électrique. On ne faisait pas les fiers. Contents de regagner l’habitacle de la voiture.

    – Autre expérience similaire mais c’est après deux bonnes heures de marche que nous voyons un éclair au loin. Pas d’hésitation à faire demi-tour. Dans notre dos, des éclairs, sur notre tête une pluie battante.

    – Nous faisons enfin cette randonnée qui nous titille depuis des années, un des sommets d’Ariège les plus ardus. Nous sommes partis tôt, avons marché toute la matinée. Nous avançons sur un sentier bien tracé sur un versant en fort dévers. Nous traversons quelques filets d’eau sans difficulté. Puis nous nous retrouvons face à un ruisseau juste un peu plus large que les autres, qui s’écoule sur de grosses pierres rondes avant de verser dans un précipice de quelques centaines de mètres. Même avec les bâtons pour nous stabiliser, on ne le sent pas. On grimpe dans l’herbe pour traverser le sentier plus haut : pas mieux. Seule décision raisonnable : faire demi-tour. Dix minutes plus tard, nous dépassons de vieux randonneurs de la région qui nous suivaient et sont allés un peu moins loin que nous avant de rebrousser chemin. Ils nous disent que l’année précédente, un randonneur est mort en essayant de passer malgré tout. Vraiment, aucun regret.

    – Et un demi-tour « de confort » qui s’est transformé en superbe occasion : rando sur deux jours, premier jour, nous remontons une vallée de plus en plus enneigée, plus que ce qu’on pensait. Ça passe sans danger mais on n’avance pas vite, on se dit que ça va être difficile de trouver un coin sympa où mettre la tente. Il y a un peu de brouillard. On ne profite pas du paysage. Nos vêtements sont humides, on a froid. Vu la quantité de neige, on ne pourra pas aller beaucoup plus loin le lendemain. Hop, demi-tour, on reprend la voiture, on conduit 15 minutes jusqu’à un autre parking un peu plus bas. On marche jusqu’à une cabane repérée sur la carte. Grand luxe : la cabane est immense, bien équipée, on est seuls. On allume un feu pour faire sécher nos affaires. Le lendemain, grand ciel bleu, on fait une superbe rando improvisée au départ de la cabane. Vue magnifique et inattendue sur le pic du Midi.

    En revanche, le coup de la crête + combe pour faire une boucle, on l’a aussi fait, on a douté jusqu’au dernier moment, mais on a fini par trouver un passage. Gros stress car on risquait de se faire piéger par la nuit et car on avançait dans une forêt dense tout en sachant grâce à la carte qu’on évoluait au-dessus d’un précipice. Gros soulagement de trouver un sentier (qui ne passait pas du tout à l’endroit indiqué sur la carte).

  • GLEIS Raymond

    Qui écouter ? L’audacieux qui prétend que « ça peut le faire » ou le chevronné qui hésite et décide de faire demi-tour ?
    Queyras – Mars 2019 – de Brunissard vers les Chalets de Clapeyto : rando raquette classique
    Mais voilà…la semaine précédant notre projet, il avait encore abondamment neigé.
    Le directeur du centre de vacances m’avait dit : « attendre que ça purge »
    4 jours après l’épisode neigeux, grand beau …on y va…skieurs de rando en tête, nous derrière en raquettes.
    Un seul passage délicat (Le Pré Premier) – quelques gros éboulis jonchent encore le sentier…Purgé ? Pas purgé ? Quelques skieurs expérimentés passent difficilement un passage en contrebas…un chevronné décide, à mi-chemin dans ce passage, de faire demi-tour.
    J’arrive avec mon groupe et j’observe la manoeuvre des uns et des autres skieurs.
    Panique et hésitation dans mon groupe …
    Même si les plus audacieux des skieurs décident de passer, je décide de reporter au lendemain cette même sortie sur base de la décision du skieur « chevronné » et des inquiétudes de la majorité des gens de mon groupe.
    Seul, j’aurais suivi les audacieux…mais responsable d’un groupe, je ne peux aller à l’encontre d’une méfiance qui se propage vite sur la majorité des participants.
    Bonne idée, car le lendemain, nous sommes passés sans la moindre inquiétude, dans les traces des audacieux de la veille ! Et Clapeyto au soleil, quelle merveille !
    En faisant demi-tour, j’ai improvisé une découverte de la « Casse Déserte » à mi-chemin du col de l’Isoard…Tranquillo, comme disent les Espagnols !
    Raymond

    • François

      Merci pour le retour.
      Une des différences est que seul, tu prends surtout la décision pour toi (même si cela pourra avoir un impact sur d’autres personnes en fonction de l’issue : secouristes, proches, etc.) alors qu’en tant que responsable d’un groupe, tu prends la décision pour d’autres personnes qui te font confiance.

      Il faut également faire attention aux personnes expérimentées – car certaines connaissant bien la montagne s’approchent plus de la limite. L’idéal est de pouvoir discuter avec ces personnes pour avoir leur avis objectif sur le risque (pas juste si ça passe ou pas. ;-)).

      • Mazaudier Henry

        Bonsoir François,
        Superbe article comme d’habitude !
        Hier mon club de marche organisait une rando aquatique dans le vercors avec de belles cascades. Vers la fin il fallait escalader un mur de rocher pour franchir une des dernières cascades, et comme je suis sujet au vertige je me suis trouvais en panique, l’animateur de la rando à essayé de me convaincre que j’allais y arriver mais quand le vertige te prend….
        Je ne voulais pas le mettre en difficulté avec tout le groupe si je me bloquais au milieu de la passe, j’ai donc décidé de faire demi tour.
        Grâce à toi, à tes formations et à mon appli GPS je suis revenu sur mes pas sans problème.
        Dommage pour les autres cascades qui ont régalé mes compagnons de rando mais très heureux d’avoir fait un choix raisonnable.

        Amicalement

  • Dominique

    Bonjour,
    Je viens de lire avec un immense bonheur les 3 volumes sur « Les décisions absurdes » de Christian Morel.
    Dans le vol. 2 (surtout) et dans le vol. 3 (un peu), il discute du ski hors-piste et du risque d’avalanche. Il relate l’expérience suisse, un modèle selon lui, qui a réussi à diviser par 5 à 10 le risque mortel par avalanche, l’amenant en-dessous du risque pris en voiture tout en induisant un abandon de la rando dans seulement 5 % des cas.
    Un très bonne discussion sur le renoncement et le demi-tour.
    La chose qui m’a le plus amusé : les groupes mixtes (hommes et femmes) sont beaucoup plus dangereux que les groupes composés seulement d’hommes. La raison ? En présence de « filles », les « mecs » ne veulent pas passer pour des « dégonflés » et prennent des risques qu’ils n’auraient pas pris autrement.

    Sinon, une rando dans le Jura avec une magnifique vue sur le Lac Léman il y a 10-15 ans. Quelqu’un nous a alors annoncé, prévenu par son portable, que l’orage arrivait. Demi-tour au galop. Arrivés juste à temps à la voiture sous les 1res gouttes d’une pluie rapidement devenue battante.
    Cordialement.

  • Laurent

    Deux renoncements récemment du côté des Fiz, avec mon fils
    Décision essentiellement prises par moi, alors que lui se disait que peut-être ce n’était pas si dangereux que ça en avait l’air de loin.
    Ce qui a permis d’accepter la décision facilement, et qu’il ne m’en veuille pas à jamais:
    1) la préparation, car on avait compris à l’avance que ces passages étaient délicats et que donc peut-être on ne les ferait pas
    2) on s’était bien mis d’accord avant de partir qu’on n’irait pas là où l’un d’entre nous ne voulait pas, qu’elle qu’en soit la raison (danger perçu, état de fatigue, autre)

    • François Jourjon

      Merci pour ce retour. C’est effectivement important de se mettre d’accord avant de partir, la bonne décision est beaucoup plus facile à prendre une fois sur le terrain et il y a moins de chance qu’il y ait des sous-entendus et des non-dits.