
La période de chasse est quelque peu délicate pour les randonneurs. Croiser des personnes, fusil à la main, aux abords des sentiers n’est pas toujours rassurant. Je sais que bon nombre d’entre vous apprécient la rando en automne et en hiver, mais sont tentés d’y renoncer par crainte de tomber sur une battue.
La relation entre randonneurs et chasseurs est parfois compliquée, car il faut partager un même « terrain de jeu ». Et puisque l’approche des uns n’est pas très compatible avec celle des autres, la cohabitation n’est pas nécessairement évidente.
Cet article va donc s’articuler autour de 6 points pour continuer à pratiquer la randonnée pendant la chasse tout en limitant les risques pour votre sécurité.
Je tiens à préciser que n’étant pas chasseur, je ne suis pas un expert sur le sujet (même si plutôt bien renseigné). Donc, n’hésitez pas à compléter ces informations avec vos commentaires, notamment si vous êtes chasseur-randonneur.
1- Connaître les périodes et les jours de chasse
Le premier point consiste à se renseigner sur les dates d’ouverture et de fermeture de la chasse dans votre région. Vous pouvez notamment consulter ces informations sur le site de la fédération nationale des chasseurs.
Vous y trouverez un lien vers l’arrêté préfectoral de chaque département, qui spécifie les jours de la semaine pendant lesquels la chasse est autorisée.
Généralement, la période d’activité principale s’étend de septembre à fin février. Toutefois, il est important de consulter les arrêtés préfectoraux pour connaître les jours exacts et les exceptions. En effet, il existe des dérogations permettant de chasser certains animaux en dehors de la période définie.
C’est également sur ce document officiel que vous trouverez les jours de la semaine durant lesquels la chasse est totalement interdite.
À titre d’exemple, pour l’Isère, le calendrier de la période de chasse 2022-2023 démarre le 11 septembre 2022 et se termine le 28 février 2023. On y apprend que la chasse est prohibée le vendredi. On peut aussi voir que le tir anticipé du renard est autorisé, sous certaines conditions, au mois de juin 2023.
Lisez donc bien ces arrêtés (également disponibles en mairie) pour pouvoir organiser vos randonnées de préférence les jours où la chasse n’est pas permise.
En ce qui concerne les forêt domaniales, vous trouverez un calendrier détaillé sur le site de l’ONF.
2- Savoir où ont lieu les chasses et où se trouvent les chasseurs
Connaître les jours de chasse est un bon début, mais pas vraiment satisfaisant. La saison de la chasse est souvent assez longue (environ 6 mois dans la plupart des départements français) et il y a beaucoup d’exceptions. Ne randonner qu’en dehors des périodes d’ouverture peut donc être assez limitant.
Se renseigner auprès des acteurs locaux
Pour randonner en période de chasse, on aimerait bien savoir où sont les chasseurs et quelles sont les zones qu’ils fréquentent. De cette manière, on pourrait les éviter afin de ne pas les déranger et ne pas se mettre en danger.
Malheureusement, il n’existe pas de solution facile et infaillible pour bien s’informer ni de support regroupant toutes les chasses et tous les chasseurs.
Le mieux est de se renseigner comme on peut.
- Auprès de la commune – même s’ils ne seront pas nécessairement au courant de ce qu’il se passe sur les propriétés privées.
- Auprès des riverains – car les coups de feu ne passent pas inaperçus.
- Auprès des associations/fédérations/sociétés de chasse. La difficulté est qu’une randonnée traverse souvent plusieurs propriétés et qu’une association de chasse n’est pas nécessairement au courant de ce qu’il se passe dans l’association voisine.
- Auprès des randonneurs et autres pratiquants d’activités de plein air – notamment ceux qui connaissent bien l’endroit dans lequel vous souhaitez vous rendre.
En général, ça vous permettra d’avoir une bonne idée des lieux à éviter. Ça ne vous garantit pas à 100 % que vous n’allez pas rencontrer des chasseurs, mais ça met plus de chances de votre côté.
Essayez également de vous renseigner sur les types de chasse pratiqués là où vous randonnez : battues, chasseurs en mouvement ou postés, seuls ou en groupe, avec ou sans chiens, etc.
Ça vous permettra de savoir à quoi vous attendre et choisir votre lieu de marche plus facilement.
Les applications pour connaître les zones de chasse
Pour certains départements, vous pourrez aussi trouver des renseignements sur les jours et les lieux de chasse grâce à des applications pour smartphone.
La fédération des chasseurs de Haute-Savoie a par exemple lancé Chasseco. Sur Google Play, cette app est décrite ainsi : « Cette application a pour objectif principal d’informer les utilisateurs de la nature sur les jours de chasse et les zones de non-chasse. En indiquant la date et la commune qui vous intéressent (ou en vous géolocalisant par GPS), vous obtiendrez la carte IGN avec une indication des territoires non chassés. »
Sur le même principe, il existe l’application Land Share pour le département isérois.
🔎 Vous connaissez un outil similaire pour votre région ? N’hésitez pas à le mentionner dans les commentaires !
Au niveau national, le Gouvernement lancera à l’automne 2023 un dispositif permettant aux chasseurs de signaler et délimiter leur périmètre d’action. Concrètement, cela pourrait se matérialiser par la création d’une application ou par la mise en place d’une nouvelle fonction sur Suricate. Cette appli est notamment conçue pour signaler les problèmes rencontrés par les pratiquants de sports de pleine nature lors de leurs activités.

3- Rester visible en randonnée pendant la chasse
Si vous êtes un fidèle lecteur du blog, vous savez que je vous recommande habituellement de vous faire discret en pleine nature, notamment en hiver, pour ne pas perturber les animaux.
👉 À lire : Respecter la faune l’hiver en randonnée : une question de survie pour les animaux !
Toutefois, si vous souhaitez randonner pendant la période de chasse, je vous invite à être un peu plus visible (et audible) qu’à l’accoutumée.
La première chose à faire est de porter des vêtements clairs, ou de couleur vive, pour que les chasseurs puissent vous distinguer de loin. Si votre sac à dos est de couleur neutre, vous pouvez également y accrocher un gilet haute-visibilité pour être repérable de dos.
En cas de mauvais temps ou lorsque la visibilité n’est pas idéale, n’hésitez pas à utiliser votre lampe frontale (en mode clignotant par exemple). Vous pouvez aussi fixer une “lampe de running” à vos vêtements et/ou à votre sac. Certains de ces petits dispositifs lumineux ne coûtent que quelques euros et améliorent considérablement vos chances d’être vu de loin.
Évitez également de randonner trop tôt ou trop tard dans la journée. L’aube et le crépuscule sont des moments propices aux déplacements des animaux… et donc à l’activité des chasseurs. D’autre part, vous serez plus facilement apercevable en plein jour qu’au lever du soleil ou à la tombée de la nuit.
Enfin, si vous craignez de ne pas être repéré visuellement par les chasseurs, vous pouvez vous munir d’un sifflet. Vous pourrez l’utiliser pour signaler votre présence de manière sonore.
🐶 Ces conseils valent aussi pour votre chien ! Si vous randonnez avec votre chien, tenez-le en laisse et équipez-le d’un harnais fluo et d’une clochette.
4- Préférer les sentiers balisés et connus des chasseurs ou les zones habitées
Pour éviter les accidents, les chasseurs doivent s’abstenir de tirer à travers la végétation ou lorsque le gibier n’est pas parfaitement identifié (consigne de sécurité édictée par l’Office Français de la Biodiversité – OFB).
Malgré tout, il est recommandé de bien rester sur les sentiers pendant vos randonnées. Ainsi, vous n’êtes pas « camouflé » par de quelconques végétaux et vous êtes plus facilement reconnaissable.
Dans l’idéal, préférez les chemins habituellement empruntés par d’autres randonneurs : les chasseurs savent généralement que ce sont des itinéraires fréquentés et ils sont plus vigilants.
Sachez aussi qu’il est strictement interdit de tirer en direction d’habitations et de routes. En cas de doute, favorisez donc les routes et les chemins situés à proximité de bâtiments. Si vous vous trouvez entre des chasseurs et des habitations, vous êtes théoriquement moins à risque, car les chasseurs n’ont pas le droit d’ouvrir le feu en direction ou au-dessus des habitations.
5- Être attentif aux panneaux de chasse en cours et à la présence des chasseurs
Les obligations en matière de signalisation de chasse
Les participants à une action collective de chasse à tir au grand gibier ont l’obligation d’être visibles et de signaler leur présence. Ainsi, vous pouvez, si vous le souhaitez, éviter les zones où ils se trouvent.
Un arrêté du 5 octobre 2020 oblige ces chasseurs à porter un gilet fluorescent, de préférence de couleur orange, visiblement et pour toute la durée de l’action de chasse. Cette règle est valable également pour les participants non armés. Attention, cela ne concerne donc pas tous les types de chasses, uniquement les chasses collectives au grand gibier.
De plus, pour ces chasses, les organisateurs doivent positionner des panneaux de signalisation de type « chasse en cours ». Il faut savoir que ces panneaux sont uniquement là pour vous inviter à être vigilants. En aucun cas cela ne vous interdit d’emprunter les chemins sur lesquels ils se trouvent. Cependant, je vous recommande tout de même d’éviter de traverser une zone à risque. Mieux vaut faire demi-tour et passer par un chemin alternatif, plus tranquille.
J’en profite pour rappeler ici l’importance de savoir s’orienter et emporter de quoi pouvoir le faire (carte, boussole, GPS, etc.) même si vous suivez un sentier balisé. Une chasse en cours vous obligeant à faire un détour n’est qu’un exemple parmi d’autres.

La conduite à tenir pour randonner à proximité d’une zone de chasse en sécurité
Si vous rencontrez des chasseurs, la meilleure chose à faire est de leur signaler votre présence et de leur demander des informations sur l’action en cours :
- Sur quelle zone sont-ils ?
- Jusqu’à quand ?
- Est-il possible de continuer votre marche ou vaut-il mieux emprunter un autre itinéraire ?
- Est-il possible de prévenir les autres chasseurs de votre passage ?
Si vous rencontrez des chiens de chasse sans leurs propriétaires, évitez les mouvements de panique et ne vous mettez pas à courir. Restez immobile et attendez qu’ils s’en aillent.
Il est aussi probable que vous entendiez des coups de feu, sans pour autant voir les chasseurs. Si c’est le cas, ne cherchez surtout pas à vous faire discret ! Au contraire : restez sur votre sentier et tâchez d’être facilement repérable.
📌 Note : ne confondez pas les coups de fusil avec les détonations des canons anti-grêle ou équivalents – car vous pourrez toujours chercher des chasseurs, vous n’en trouverez pas.
6- Réagir vite en cas d’accident de chasse
J’espère que vous n’aurez jamais à utiliser les conseils contenus dans ce paragraphe. Toutefois, si vous ou vos camarades de randonnée veniez à être victimes d’un tir dans votre direction, voici quelques recommandations :
- Criez ! « Stop ! », « Halte au feu ! ». Indiquez par tous les moyens aux chasseurs qu’ils doivent cesser les tirs immédiatement.
- Si quelqu’un est blessé, analysez la situation et agissez en conséquence :
- Mettez la victime à l’abri et rassurez-la.
- Prévenez rapidement les secours.
- Effectuez les premiers soins si nécessaire (et si vous le pouvez).
- Si cela est possible, assurez-vous que les chasseurs et les témoins de l’accident restent bien sur les lieux jusqu’à l’arrivée des secours et de la gendarmerie.
- Ce n’est sans doute pas une chose que vous aurez envie de faire sur le moment, mais sachez que les assurances recommandent de prendre des photos (des blessures, des projectiles, de l’environnement…) afin de faciliter les procédures d’indemnisation.
👉 À lire aussi : Accident en randonnée : les bons réflexes à adopter.
Quelques chiffres pour finir…
Lors d’une interview en 2022, Willy Schraen (président de la Fédération nationale des chasseurs) conseillaient aux marcheurs inquiets « de se promener chez eux, pour n’avoir aucun problème ». Disons-le clairement : ce n’est pas la meilleure manière d’apaiser la relation entre randonneurs et chasseurs.
Rappelons que selon l’OFB, 95 victimes d’accident ont été comptabilisées pour la saison de chasse 2021-2022.
- 8 accidents se sont avérés mortels : deux non-chasseurs ont perdu la vie, dont une jeune randonneuse de 25 ans tuée sur un sentier balisé dans le Cantal.
- 44 sont considérés comme des événements graves (entraînant plus de 10 jours d’ITT) : 6 non-chasseurs sont concernés.
- 43 incidents légers sont à déplorer : 17 victimes sont des non-chasseurs.
Au total, « seulement » 26 % des accidents de chasse concernent des randonneurs, vététistes, promeneurs ou riverains. Il convient aussi de noter que 17 % des faits répertoriés sont liés à des tirs vers des routes, des habitations ou des chemins ouverts au public.
Le respect des règles élémentaires de sécurité par tous les pratiquants d’activités de pleine nature (et d’autant plus ceux qui sont armés) semble donc indispensable pour faire baisser ces chiffres et espérer une cohabitation plus sereine entre randonneurs et chasseurs.
Comme d’habitude, n’hésitez pas à me faire part de vos avis et expériences dans les commentaires ci-dessous. Le sujet est sensible et je sais que certains d’entre vous ont probablement des avis forts, mais merci de rester courtois dans vos messages.
Ressources complémentaires :
[…] Le site de l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage La cohabitation entre chasseurs et randonneurs en 6 questions sur Randonner Malin […]